Acte V, scène 1

Au-dessus des toits, l'ombre grise cède peu à peu la place à la lumière douce qui renaît. Les étoiles s'éteignent une à une.

Ceux qui sont déjà levés, comme ma petite amie la servante, font tinter leurs ustensiles dans les cuisines.

L'enfant de la jeune mère réclame doucement sa tétée.

Peut-être que la vieille dame a rendu son dernier souffle, comme elle le souhaitait si fort.

Le savant, le moine, la sentinelle, qui se sont endormis les derniers ronflent bruyamment ! Je les entends presque de là où je suis ! Et le voleur compte à l'abri son maigre butin.

Je crois aussi que notre jeune Prince est debout, et médite en silence avant de commencer sa journée au service de tous.

Dans la chambre à côté de lui, le Poète est encore tout à l'écoute de ses élans passionnés pour écrire les vers qui vont magnifier sa dernière aventure, comme il me l'a promis.

J'espère aussi que la belle Dame a trouvé enfin le sommeil, le coeur apaisé...

Je vais bientôt remettre les clés à la garde du jour. Les lourdes portes de la Ville seront alors ouvertes à nouveau, pour laisser passage à tous ceux qui vont et viennent, pour leurs affaires, ou leurs amours...

Et dans peu de nuits, je reviendrai ici, comme si souvent. Et chaque heure, des noctambules immobiles m'interpelleront à nouveau. Ce sont presque toujours les mêmes. Et je suppose que je leur suis utile, par ma seule présence rassurante, puisqu'ils ne se lassent pas de me questionner à nouveau.

Parfois, une voix nouvelle se lève, et je suis alors plus attentif encore à son appel [...]

(Extrait de VEILLEUR OU EN EST LA NUIT ?)                                Retour